NOTION D’ACQUISITION - ART.15 : INCERTITUDE

ARTICLE 15 LOI ALUR, NOTION D’ACQUISITION : NOUVELLE INCERTITUDE

 

La loi ALUR, en 2014, a renforcé les droits du locataire dont le logement est vendu occupé.

Son article 5, est venu modifier l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989, qui comprend les règles relatives à la délivrance des congés, notamment dans le cas d’un bien occupé. Des précisions importantes, apportées dans le but d’améliorer les rapports locatifs. Cependant, la « notion d’acquisition », est, dès le début, venue perturber ces modifications. Dans le cas d’une acquisition faite à titre gratuit, comme dans le cas d’une succession, les dispositions de l’article 15 sont-elles identiques à une acquisition à titre onéreux ?

 

LES MODIFICATIONS DE L’ARTICLE 15 EN CAS D’ACQUISITION D’UN BIEN OCCUPÉ

 

L’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit désormais qu’en cas « d’acquisition d’un bien occupé » :

 

– Lorsque le terme du contrat de location en cours intervient plus de 3 ans après l’acquisition, le bailleur peut donner congé pour vendre au terme du contrat de location ;

– Lorsque le terme du contrat de location intervient moins de 3 ans après la date d’acquisition, le bailleur ne peut donner congé à son locataire pour vendre le logement qu’au terme de la première reconduction tacite ou du premier renouvellement du contrat de location en cours ;

– Lorsque le terme du contrat en cours intervient moins de 2 ans après l’acquisition, le congé pour reprise donné par le bailleur au terme du contrat de location en cours ne prend effet qu’à l’expiration du délai de 2 ans à compter de la date d’acquisition.

 

LE DÉBAT ET LES CONTRADICTIONS DE LA « NOTION D’ACQUISITION »

 

A l’époque, un débat doctrinal est intervenu concernant cette notion « d’acquisition ».

Certains, tel que le CRIDON, ont considéré que seules les acquisitions à titre onéreux étaient concernées.

 

D‘autres, comme la Chambre des Huissiers de Paris, ont considéré au contraire que l’ensemble des acquisitions, qu’elles soient à titre onéreux ou gratuit, étaient concernées.

Très attendue, une première décision est intervenue en 2019. Un arrêt de la Cour d’Appel de Paris du 12 mars 2019 a, en effet, indiqué qu’en cas d’héritage, le renouvellement et la prorogation du bail prévus à l’article 15 ne s’appliquait pas à l’héritier, en raison de la nature particulière de la dévolution successorale, qui intervient par l’effet des règles légales la gouvernant et sans autre manifestation de volonté que l’acceptation (Cour d’Appel de Paris, 12 mars 2019 : n°16/17263)

Patatras, quatre ans plus tard, la même juridiction vient énoncer le contraire :

« Il ne résulte pas du texte précité que les conditions énoncées ne s’imposent qu’aux acquéreurs à titre onéreux d’un bien occupé et non aux acquéreurs à titre gratuit, comme c’est le cas en l’espèce ; il n’y a donc pas lieu d’ajouter à la loi, protectrice des droits du locataire, une condition qu’elle ne contient pas » (Cour d'appel de Paris, Pôle 4 chambre 3, 6 octobre 2022, n° 20/04688)

En attendant une décision de la Cour de Cassation , en cas d’acquisition du bien occupé, que ce soit par mutation à titre gratuit ou onéreux, il conviendra de respecter ces fameuses conditions de l’article 15 lors d’un congé donné au locataire.